Dans ma version d’inhibition, symptôme et angoisse, celle du PUF, couverture marron, la page 42 est à la fois magistrale et terriblement difficile, ce qui est surprenant dans ce passage c’est qu’il rapproche l’un des mécanismes typiques des modes de refoulement de la névrose obsessionnelle, ce qu’il appelle « annulation rétroactive » de la « compulsion de répétition ».
Or ce texte d’inhibition a été publié en 1925, donc après la rédaction de son au-delà du principe de plaisir, avec ce qu’il a élaboré de la pulsion de mort. De ce que j’ai compris de ce passage, il me semble qu’il étend ce mécanisme d’annulation rétroactive à la compulsion de répétition. Pour le dire autrement ce qu’il a appelé compulsion de répétition est de fait une tentative d’annulation rétroactive.
C’est quelque chose qui me parait surprenant car, après avoir soutenu mordicus, pendant des années que la névrose obsessionnelle avait toujours un substratum de symptômes hystériques, là tout d’un coup, c’est un typique symptôme obsessionnel qui viendrait essayer d’endiguer les effets mortifères de l’événement dit traumatique. Un symptôme en quelque sorte premier.
Si nous le vérifions dans le texte voici comment Freud écrit ces mécanismes : Il décrit plusieurs phénomènes qui, je pense éclaire un peu cette question et même nous permettent de sortir de cette difficulté :
1 – Les symptômes en deux temps de la névrose obsessionnelle (la pierre posée sur la route de la dame pour qu’elle trébuche dessus, puis enlevée, dans une second temps).
2 – Il y a un autre ordre de phénomènes qui est décrit comme un « comportement normal » : l’effort d’annulation rétroactive est esquissé, pour le comportement normal, dans la décision de traiter un événement comme « non arrivé ». Dans ce cas on n’entreprend rien contre cet événement et on ne s’en soucie pas plus que de ses conséquences, tandis que dans la névrose on cherche à supprimer le passé lui-même et à le refouler de façon motrice.
3 – En troisième arrive alors la question de la compulsion de répétition qui est bien liée par Freud à ce « refouler de façon motrice »
« La recherche de la même fin peut aussi fournir l’explication de la compulsion de répétition, si fréquente dans la névrose, et dont l’accomplissement révèle la réunion de diverses intentions contradictoires. Ce qui n’est pas arrivé conformément au désir, est annulé par sa répétition sous une autre forme ; à cela alors s’ajoute tous les motifs de s’attarder à ces répétitions. Dans le cours ultérieur de la névrose, ce même effort pour annuler une expérience traumatique se révèle un motif de première importance dans la formation de symptôme. »
Je vais relire bien sûr ce que Freud dit de cet automatisme de répétition en tant qu’elle est liée par lui à la pulsion de mort, mais je me demande si ce qu’il appelle « refouler de façon motrice » ce n’est pas simplement ce qu’auparavant il appelait rejeter hors du conscient une représentation inconciliable. Elle en est littéralement chassée.
Dans ses premiers textes, Freud affirmait que dans la névrose obsessionnelle, la représentation inconciliable restait dans le champ de la conscience mais était complètement désinvestie de ses affects, cela ne faisait au sujet ni chaud, ni froid ( relire l’histoire de l’homme aux billets de banque). C’est le mécanisme de l’isolation, tandis que dans l’hystérie, il y a une amnésie des faits : on oublie ce qui s’est passé, sauf que ce qui a été oublié revient dans des symptômes corporels. C’est le cas de le dire, c’est un corps parlant. Lucy a oublié l’événement traumatique qui a motivé l’apparition de son hallucination olfactive : Au cours de cette scène elle aurait dû admettre que jamais elle ne pourrait remplacer dans le cœur de cet homme, la mère de ses enfants, la mère morte.
A propos de la compulsion de répétition, il y a un texte très intéressant d’Hélène Deutsch que je vais retrouver sur les névroses de destinée. Sinon il faut relire l’au-delà du principe du plaisir et ce que Freud indique d’une part des névroses traumatiques, névroses de guerre et des hystéries traumatiques après des accidents de chemin de fer ainsi que le jeu du Fort/Da où l’enfant symbolise ce qu’il en est de l’absence de la mère.