Entre intestin et vagin que choisir ?

Il existe une première contradiction pour l’homme aux loups, elle se situe entre la découverte et la prise en compte de la réalité de la castration et le fait qu’il pense en même temps que c’est par l’anus que s’effectuent les rapports sexuels. C’est à cette contradiction que Freud se réfère au milieu de cette page 231 :

Premier point « refus de s’identifier avec sa mère » dans cette scène primitive, refus qui s’exprime par un symptôme « angoisse d’avoir du sang dans les selles, d’être malade comme sa mère ».Second point : « l’organe où pouvait s’exprimer l’identification avec la femme, l’attitude homosexuelle passive envers l’homme était la zone anale. Les troubles de la fonction de cette zone avaient reçu la fonction de motions féminines de tendresse… »

Troisième point et c’est là que Freud soulève cette question de la contradiction, il avait en effet  perçu la réalité de la différence des sexes et pourtant il maintenait la possibilité d’être satisfait par son père au niveau de la zone anale, donc comme si aussi bien les hommes que les femmes pouvaient avoir des enfants, puisque c’était par cette voie qu’ils venaient au monde (on retrouve là  le fantasme de grossesse de l’Homme aux rats).

Voici comment Freud résout ou tout au moins interprète cette contradiction «  Nous avons dû admettre qu’il avait compris pendant le processus du rêve que la femme était castrée, qu’elle avait à la place du membre viril une blessure qui servait au rapport sexuel, que la castration était la condition de la féminité et qu’à cause de cette perte menaçante il avait refoulé l’attitude féminine envers l’homme et s’était réveillé avec angoisse de son exaltation homosexuelle. » Oui mais alors « comment cette reconnaissance du vagin s’accorde-t-elle avec le choix de l’intestin pour l’identification à la femme ? »Deux conceptions coexistent dont l’une est plus ancienne, en contradiction complète avec l’angoisse de castration : « l’orifice de l’intestin est le lieu du rapport sexuel »

« Certes, écrit Freud, cette contradiction existe et les deux conceptions ne s’accordent pas du tout entre elles. La question est simplement de savoir s’il est nécessaire qu’elles s’accordent. Notre embarras provient de ce que nous sommes toujours enclins à traiter des processus psychiques inconscients comme des processus conscients et à oublier les profondes différences des deux systèmes psychiques.

Je garde pour la bonne bouche le paragraphe qui suit en de la page 232 puisque c’est là qu’est introduit le terme de forclusion, de rejet de la castration. A ce propos, nous verrons se renouveler cette non prise en compte du principe de contradiction, cette fois-ci non plus entre deux organes mais deux mécanismes de défense, celui, de la forclusion et celui de du refoulement, pour Freud, et c’est écrit noir sur blanc, ils coexistent ensemble, sans se gêner le moins du monde. En attendant il faut juste bien repérer ce qu’il en est de la contradiction portant sur l’organe mis en jeu dans le rapport sexuel, intestin ou vagin. Je me demande quand même si la considération du vagin comme blessure, blessure telle qu’elle provoque l’angoisse de castration, témoigne de sa reconnaissance je dirai anatomique. Je pense que Freud n’a pas encore décrit ce qu’il appelle la phase phallique, celle qui précède le stade proprement génital et où la différence des sexes se marque entre justement l’un phallique, l’autre castré.

Il me semble que c’est là que la citation de Lacan que je vous ai indiqué l’autre jour, dans l’un de mes précédents messages, sur l’incastrabilité de la femme, prend tout son poids, elle n’a jamais été castrée, car de fait ce phallus elle ne l’a jamais eu : il n’y a jamais donc eu la moindre blessure, sauf une grave blessure narcissique, mais de celle-là on peut se remettre.

Il me semble donc que dans ce temps d’élaboration de Freud sur le complexe de castration, cette non-castrabilité d’une femme n’est pas encore prise en compte. Mais c’est bien sûr à vérifier.

Laisser un commentaire

Navigate