Deux rêves du même analysant introduisent toutes les questions que Freud se pose à leur sujet.“ Lors d’une représentation de Fidelio à l’opéra, il se trouve à l’orchestre à côté de L., une personnalité qui lui est sympathique, dont il aimerait gagner l’amitié. Tout à coup, il s’envole en biais au dessus de l’orchestre, qu’il traverse jusqu’au bout, se met la main dans la bouche et s’extrait deux dents.”
Une citation extraite d’un poème de Schiller sert d’interprétation à ce rêve “ Qui a réussi le coup gagnant d’être l’ami d’un ami”. Il s’agit en effet, nous dit Freud, dont l’homosexualité est très forte mais aussi très inhibée.
Le second rêve le confirme :
“ Deux professeurs d’université connus de lui le traitent à ma place. L’un d’eux fait quelque chose à son membre ; il est angoissé à l’idée d’une opération. L’autre frappe avec une barre de fer sur sa bouche, si bien qu’il perd deux dents. on l’attache avec quatre foulards de soie.”
Les foulards de soie correspondent à une identification à un homosexuel et se représente les rapports sexuels “ sur le modèle de l’onanisme pubertaire”.
Ce que Freud essaie de déchiffrer avec l’aide de chacun de ces rêves c’est le fait que c’est en effet l’excitation proprement sexuelle, pénienne, que est transférée, déplacée du bas vers le haut, du sexe vers les dents et pour le démontrer il se réfère aux mécanismes hystériques. p. 428 et 429.
Il écrit “ j’attire ici l’attention sur la translation si fréquente du bas vers le haut qui est au service du refoulement sexuel ( cela rappelle la toux de Dora liée à “ses flueurs blanches”) et par le moyen de laquelle dans l’hystérie toutes sortes de sensations et d’intentions qui devaient se dérouler au niveau des organes génitaux peuvent au moins être réalisées à même d’autres parties – irréprochables” – du corps.
Il arrive ainsi à cette si surprenante conclusion “ Une seule formation facile organique est à l’écart de toute possibilité de comparaison : les dents, et c’est précisément cette concomitance de la concordance et de l’écart qui approprie les dents aux finalité de la figuration sous la pression du refoulement sexuel”.
Donc, si je suis bien ce que raconte Freud, un stimulus sexuel venu des organes génitaux migrant du bas vers le haut vient se manifester comme stimulus dentaire et exprime des fantasmes masturbatoires de la période de la puberté.
C’est là qu’il reprend la formule déjà citée à propos de la masturbation “ s’en arracher une” qui évoque en effet l’arrachage d’une dent.
Freud évoque plusieurs rêves à stimulus dentaire dont un qui vient confirmer avec preuve à l’appui ce déplacement de l’excitation sexuelle celui où l’arrachage de la dent dans son rêve provoque une pollution.
C’est en effet curieux que ce soit l’arrachage des dents soit l’équivalent de la castration qui provoque la pollution, comme si l’ordre de la cause et de son effet était inversé. la punition provoquant la satisfaction.
Dans le second rêve, les castrateurs sont en effet des substituts de Freud et ce sont des rêves faits en cours d’analyse. Je me demande si, une fois interprétés, ces rêves ne mettent pas en scène une authentique castration symbolique, car par leur contenu manifeste, ils seraient en somme une “ fantasmatisation de la castration”.