Mes périgrinations autour de ce Vorstellungsrepraësantanz, traduit en français par Représentant de la représentation, sont parties d’un passage de Lacan dans le séminaire du désir et de son interprétation, où il analyse le rêve dit du père mort et qui ne le savait pas ainsi que le rêve de la petite Anna Freud. Il pose ce terme comme strictemement équivalent au signifiant.
Je vais vous dire ce qui m’a fait difficulté c’est le fait qu’en d’autres points du séminaire et notamment dans le séminaire de l’Ethique de la psychanalyse, il pose la même équivalence entre le signifiant et cette fois-ci ce que Freud appelle les « représentations de choses », en allemand, les Sachevortellungen. Ce sont donc ces deux termes que j’ai essayé de retrouver dans les deux textes de la métapsychologie freudienne, L’inconscient et le Refoulement.
De fait ce qu’il y a de surprenant c’est qu’il n’existe qu’une seule occurrence de ce Vorstellungsrepraësentanz, c’est dans le texte intitulé Le Refoulement. Elle est articulé d’une part à la définition de la pulsion, d’autre part à ce que Freud nomme refoulement originaire.
« Nous sommes donc fondés à admettre un refoulement originaire, une première phase du refoulement, qui consiste en ceci que le représentant psychique (représentant de la représentation) de la pulsion se voir refuser la prise en charge dans le conscient. Avec lui se produit une fixation ; le représentant correspondant subsiste, à partir de là, de façon inaltérable et la pulsion demeure liée à lui ».[1]
Nous n’avons que cette seule et unique occurrence de ce que peut être ce représentant de la représentation, par contre il me semble que dans la définition même de ce que Freud nomme la pulsion, nous pouvons retrouver une trace de ce qu’est « la représentation » : « Si, en nous plaçant d’un point de vue biologique, nous considérons maintenant la vie psychique, le concept de pulsion nous apparaît comme un concept limite entre le psychique et le somatique, comme le représentant psychique des excitations issues de l’intérieur du corps et parvenant au psychisme, comme une mesure de l’exigence de travail qui est imposée au psychique en conséquence de sa liaison au corporel. » [2]
Pourrions nous dire qu’entre les deux termes représentant de la représentation ce situe ce saut entre le corporel et le psychique qui définit la pulsion ? Je n’ose l’affirmer, car cette représentation impossible relève du Réel.
Voici maintenant comment Lacan reprend ce terme du Vorstellungsrepraësentanz et le pose comme équivalent au signifiant, non seulement au signifiant mais aussi comme signifiant présidant à la naissance du sujet entre le deux premiers signifiants S1 et S2 .
C’est pour Lacan en effet le S2 qui est le Vorstellungsrepraësentanz :
« Aujourd’hui je voudrais vous montrer l’importance […] de ce que Freud appelle, au niveau du refoulement, le Vorstellungsrepraësentanz […] J’avais relevé que Freud accentue ceci, que le refoulement porte sur quelque chose qui est de l’ordre de la représentation qu’il nomme le Vorstellungsrepraësentanz. Dès que j’ai introduit, il y a plusieurs années cette remarque – ce qui était aussi une façon de lire ce que Freud écrit sous le titre de la Verdrangung[…] j’ai insisté sur le fait que Freud souligne que ce n’est pas l’affect qui est refoulé. L’affect et nous verrons ce que cela veut dire dans notre théorie – va se promener ailleurs, là où il peut […] J’ai donc insisté sur ceci que ce qui est refoulé, ce n’est pas le représenté du désir, la signification, mais le représentant – j’ai traduit littéralement de la représentation […]
Nous pouvons le localiser dans notre schéma des mécanismes originels de l’alienation, ce Vorstellungsrepraësentanz, dans ce premier couplage signifiant qui nous permet de concevoir que le sujet apparaît d’abord dans l’Autre, en tant que le premier signifiant, le signifiant unaire surgit au champ de l’Autre, et qui représente le sujet pour un autre signifiant, lequel a pour effet l’aphanisis du sujet. D’où division du sujet – lorsque le sujet apparaît quelque part comme sens, ailleurs il se manifeste comme fading, comme disparition […] Le Vorstellungsrepraësentanz c’est le signifiant binaire.
Ce signifiant vient à constituer le point central de l’Uverdrangung – ce qui, à être passé dans l’inconscient, Freud l’indique dans sa théorie, le point d’ « Anziehung » le point d’attrait, par où seront possibles tout les autres refoulements.
Nous pouvons inscrire sur le graphe du désir, ce qu’il en est du refoulement originaire au point d’inscription de la pulsion, le circuit du refoulé qui tourne en rond et qui finit au point du message de temps en temps comme retour du refoulé, soit comme symptôme :
Séminaire des 4 concepts fondamentaux, séance du 3 juin 1964. P. 199.
1 Comment
Dans le groupe de lecture du Séminaire 7 (à Londres), nous sommes tombé sur ce terme (Vorstellungsrepraësantanz), il nous a été difficile de le situer et le traduire. Je ferai circuler ce que tu en dis, ça permettra d’aimenter la discussion.