Psychanalyse

Le rêve de la guillotine (Maury)

1793-execution-of-louis-xvi-1316x648Ce rêve de Maury a été choisi par Freud comme un des exemples qui explicite comment les stimuli extérieurs, stimuli sensoriels, sont intégrés dans un rêve, coûte que coûte, au prix même d’un certain forçage.

Voici le texte de ce rêve tel qu’il est rapporté «  Il était souffrant, au lit, dans sa chambre. Sa mère était assise à côté de lui. Et voilà qu’il rêve de la terreur à l’époque de la révolution, assiste à d’abominables scènes de meurtres et se retrouve lui-même cité à comparaître devant le tribunal. Il vit là Robespierre, Marat, Fouquier-Tinville et tous les tristes héros de cette sinistre époque, fit face à leurs questions et fut condamné en raisons de toute sorte d’incidents annexes qui ne se sont pas fixés dans son souvenir, puis accompagné d’une foule innombrable, conduit au lieu d’exécution. Il monte sur l’échafaud, le bourreau l’attache sur la planche : celle-ci bascule, le couteau de la guillotine tombe, il sent que sa tête est séparée du tronc, se réveille en proie à la plus épouvantable angoisse. Et découvre que le baldaquin s’était effondré et avait touché sa vertèbre cervicale, très réellement comme le couteau de la guillotine. »

Comment les souvenirs d’enfance oubliés sont retrouvés dans et par les rêves

asplenium ruta muralisLes rêves « hypermnésiques »
Ce qualificatif d’hypermnésique à propos du rêve a été choisi par Freud dans l’un des premiers chapitres de son Interprétation du rêve, intitulé «  B – Le matériau du rêve -La mémoire dans le rêve ». Au cours de mes premières lectures de cet ouvrage, il y a des années, je n’avais jamais prêté attention à ce qualificatif qui résonne pourtant bien avec la célèbre amnésie infantile. C’est en effet grâce, si on peut dire, à ces rêves hypermnésiques (ou supermnésiques ?) que cette dite amnésie infantile peut être levée. Car ils révèlent les plus précieux de nos souvenirs d’enfance et donc les sources de notre névrose. Il me semble que les rêves qui suivent en apportent démonstration.*

“Mon père, ce héros…”

gilgamesh_louvreComment des prouesses de l’analysant et de celles, plus modestes, du psychanalyste, s’assurent les réinventions de la psychanalyse

“Mon père, ce héros…” Cette évocation, née des grandiloquences de Victor Hugo, pourrait être celle de chaque femme hystérique. Son père est en effet toujours pour elle ce héros féminisé souvent vaincu dont elle partage, par identification, le triste destin. De connivence avec lui, complice de ses exploits, elle garde juste ce qu’il lui faut de distance nécessaire pour pouvoir s’en amuser. C’est ce qui la sauve.

Les premiers des héros au “pays des sept épouvantes”, au pays de la phobie

C’était l’enfance de l’humanité. Sur les bords du Tigre et de l’Euphrate, l’antique cité d’Ourouk élevait à peine ses remparts que déjà les deux premiers héros de l’humanité, Enkidou et Gilgamesh, avaient vu le jour. Leurs hauts faits sont racontés avec l’aide des premières écritures sumériennes.
Nous apprenons que tous deux ont tué le gardien de la forêt des cèdres, Houmbaba, un monstre dont “le mugissement est celui du déluge” et ils ont ainsi pu pénétrer, premiers des héros, dans ce “pays des sept épouvantes”.
Ils ne peuvent qu’en tirer gloire et se faire un nom :
“ Ecoutez, anciens d’Ourouk, je veux, moi, Gilgamesh, voir celui dont on parle, celui dont le nom épouvante le pays, je veux le combattre dans la forêt des cèdres, je veux couper les cèdres et me faire un nom immortel. Je ferai entendre au pays les récits du fils d’Ourouk et le pays dira : “Qu’il est vaillant le fils d’Ourouk!”

Trois boutures de jasmin; Nouvelles

Souleyman est marocain. Il vient de la région de Ouarzazate. Ses parents y cultivent un petit lopin de terre et possèdent quelques palmiers. Adolescent, il rêve d’une vie meilleure et envisage de venir en France pour y travailler. Un jour, il prépare un très léger bagage et se met en route vers le Nord. Sa jeune sœur, Leila, glisse dans son sac trois boutures du jasmin odorant qui pousse au pied de leur modeste maison de briques… Trois boutures de jasmin est le titre de l’une de ces nouvelles. Quelques autres l’accompagnent : Arthur le poète ; La terrible vengeance de Victoire, la petite trapéziste; Une escapade en déambulateur ; La vie de château ou encore «Ma vie avec le docteur Lacan». Une messagère clandestine s’est glissée entre les pages de cet ouvrage, espérons que le lecteur la découvrira avec plaisir. Photo de couverture Daniel Denise. Sculpture de Gilles Blanchard : «Secrets de…

A propos des effets de la guerre sur les belligérants

J’ai trouvé dans l’une des lettres de Freud adressée à Jones une remarquable description métapsychologique des mécanismes déclencheurs d’une névrose de guerre. Il écrit cette lettre peu de temps après la fin de la guerre de 1914 puisqu’elle est datée du 17 octobre 1918. Il écrit : « … je suis généralement, en ce moment dépourvu d’idées, néanmoins quelques unes me viennent à l’esprit le matin au réveil. Je mets à votre disposition la dernière de celles-ci, relative aux névroses traumatiques de guerre. Il s’agit d’un conflit entre deux idéaux du moi, l’idéal habituel et celui que la guerre a suscité chez le sujet. Le dernier idéal se rapporte aux relations avec de nouveaux objets ( officiers et camarades) et équivaut ainsi à un investissement objectal. Nous pourrions parler d’un choix objectal en disharmonie avec le moi ( en note : en disharmonie avec le moi antérieur). Donc le conflit peut se produire…

Un extrait de mon livre, « La fonction du père et ses suppléances »

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Les aléas de la fonction paternelle dans la névrose et dans la perversion

À partir de deux fictions littéraires, La Légende de saint Julien l’hospitalier, l’un des trois contes de Flaubert, puis le roman de Michel Tournier, Le Roi des aulnes, j’essaierai de mettre en évidence ce qui différencie au plus juste la fonction défaillante du père dans l’hystérie et dans la perversion et les deux façons de compenser ce fait psychique.

En effet, ce conte de Flaubert peut être mis au rang des grandes œuvres parricides et hystériques avec celles d’Œdipe, d’Hamlet et des frères Karamazov tandis que le roman de Michel Tournier, redonnant une nouvelle vie, par sa traduction de l’allemand vers le français, au beau poème de Goethe, se révèle une magnifique analyse structurale, une rigoureuse mise à plat de toutes les variantes d’un vrai fantasme pervers. Ce fantasme, Michel Tournier l’appelle une pédéphorie 1. Ce nom a été forgé par lui, à partir du verbe grec phorein, porter, pour décrire la jouissance singulière qu’éprouve son héros, Abel Tiffauges, quand il porte un enfant dans ses bras. Dans la progression du roman, cette « pédéphorie » subit ensuite une « inversion maligne », elle devient « pédophilie » et nous donne donc une approche inattendue de cette perversion.

La fonction du père et ses suppléances (extrait)

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Joyce le héros, Joyce le poète…
et « Joyce le symptôme »

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Il est tentant de mettre à l’épreuve la comparaison des deux approches de la création poétique que nous proposent Freud et Lacan en se référant à l’une des premières œuvres de James Joyce, Dedalus. Joyce s’y identifie à ce héros du mythe grec qui avait construit, à la demande du roi Minos, un labyrinthe pour y enfermer le Minotaure. Pour pouvoir s’échapper de cette île, Dédale et son fils Icare se fabriquèrent des ailes et purent ainsi échapper à leur prison insulaire par les airs, tels des oiseaux.

On peut en effet retrouver dans cette œuvre de James Joyce, tout d’abord, ce que Freud nous propose, ces trois temps, passé, présent, futur, enfilés sur le cordeau du désir : le désir du lecteur est certes réveillé par la lecture de cette œuvre lorsqu’il s’identifie au héros, en l’occurrence à Dédale. Mais, selon la célèbre formule de Lacan, le désir étant « désir de l’Autre », on peut aussi en déduire, en toute bonne logique, que ce désir du lecteur est également celui de l’auteur.

La fonction du père et ses suppléances

La fonction du père et ses suppléances Sous la plume des poètes Sommaire Préface de Gérard Haddad Chapitre I Écrits de leur plus belle plume 1- L’art poétique et l’art analytique 2- Ces troubadours de l’inconscient que sont les poètes et les psychanalystes 3- Joyce le héros, Joyce le poète… et « Joyce le symptôme » Chapitre II L’œuvre poétique de Goethe évoquée par Freud et par Lacan 1- Quand Freud recevait le prix Goethe de littérature 2- Où on découvre les liens de la création poétique et de la création des symptômes. Les souffrances de Goethe et celles du jeune Werther 3- La fonction de l’œuvre qu’elle soit littéraire ou analytique 4- Quand Lacan, à son tour, s’intéresse à l’œuvre de Goethe Chapitre III Les naissances d’une œuvre : Proust, Mallarmé et Rilke 1- « Comme dans les bras d’un père retrouvé ». Les premières pages écrites par le jeune Marcel Proust 2- « Je…

Déchiffrer les imbroglios du double graphe du désir avec l’aide de Geluck

En lisant le séminaire des Formations de l’inconscient, on peut réussir à reconstruire les trajets sur le graphe du désir des deux traits d’esprit que Lacan  a emprunté à Freud, celui du « Famillionnaire » et celui du veau d’or qui n’est plus adoré car il est, de par la magie de son auditeur, devenu veau de boucherie. Il faut toujours, pour qu’un trait d’esprit fasse rire, qu’il apporte une touche d’absurdité et de faute de logique : J’aime bien celui-ci inventé par Geluck : « Ce qu’on est arrivé à faire avec le téléphone sans fil, est-ce qu’on va le réussir un jour avec les haricots ? »  Qu’y a-t-il en effet de commun entre ces deux fils à part le mot lui-même ? On voit bien que c’est au niveau du code que s’effectue le changement de sens de ce fil et que c’est ce virement de la signification qui nous fait rire. Cependant,  même…

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