Comment Hanns Sachs analyse le rêve de Bismarck, sans la présence, ni l’aide du rêveur (Suite)

C’est intéressant de voir comment, malgré l’absence du rêveur et de ses associations, l’analyste, Hanns Sachs analyse ce rêve grâce justement à la symbolique du rêve mais aussi en prenant appui sur les circonstances dans lesquelles Bismarck avait fait ce rêve, circonstances qui sont rapportées par l’auteur de ce rêve dans ses mémoires.

Pour rappel, je reprends le texte de ce rêve : “ J’ai rêvé et raconté dès le lendemain matin à ma femme et à d’autres témoins que je chevauchais sur un étroit sentier des Alpes, l’abîme à droite, les rochers à gauche ; le sentier se rétrécissait soudain, en sorte que le cheval se mettait à refuser et il était impossible à cause du manque de place de faire demi-tour ou de descendre de cheval ; j’ai alors frappé avec ma cravache, que je tenais dans la main gauche; sur la paroi rocheuse entièrement lisse en implorant Dieu. La cravache s’est alors allongée à l’infini, la paroi à basculé comme un décor de théâtre, découvrant un large chemin avec vue sur les collines et une vaste forêt comme en Bohème, ainsi que des troupes prussiennes derrière leurs drapeaux, et en moi-même, toujours dans le rêve, je pensais à la façon dont je pourrais promptement faire savoir tout cela à votre majesté. Ce rêve s’est accompli et je m’en suis réveillé joyeux et ragaillardi.”
Nous en sommes donc p. 419. Le titre du paragraphe étant intitulé “ Un rêve de Bismarck”.

L’analyste interprète ce rêve en le décomposant tout d’abord en deux parties, dans la première, il y est question des soucis actuels du rêveur, il se trouve en très grande difficulté, il ne peut plus ni reculer, ni avancer. Il s’agit selon l’analyste de la situation critique de l’homme d’État. Il souligne la phrase du texte du rêve : “Faire demi-tour ou reculer… impossible”. Puis inaugurant la deuxième partie, où il est question pour de bon du désir du rêve, l’analyste souligne cette phrase : “ On a ici “ Alpenfad” qui veut dire “sentier dans les Alpes”
“ Bismarck savait sans doute déjà à l’époque qu’il allait passer ses vacances dans les Alpes – à Gastein ; le rêve qui l’y transportait le libérait donc d’un coup de toutes les pesantes tâches de l’homme d’Etat. “ A partir de ce signifiant, Alpenfad, qui se rapproche de Alptraum, rapprochement effectué par les traducteurs et qui signifie cauchemar, on entre dans l’analyse de cette deuxième partie. Soudain le rocher s’écarte et une vaste plaine se découvre et s’y trouve l’armée prussienne victorieuse en pays ennemi à savoir en Autriche.
“ Quand il voit les troupes prussiennes en Bohème, en territoire ennemi par conséquent avec leurs drapeaux, le rêve lui présente comme satisfait ainsi que Freud le postule”.

Ceci est donc la seconde strate de l’interprétation de ce rêve, mais l’analyste ne s’arrête pas à ce second niveau et poursuit son analyse, justement avec cette cravache qui s’allonge à l’infini.

Il écrit “ le fait de prendre dans la main cette cravache est une allusion nette à la masturbation, en l’espèce de laquelle naturellement on ne songera pas aux conditions de vie actuelle du rêveur, mais un plaisir d’enfant enfoui dans un lointain passé”. C’est donc ici, qu’on retrouve “ la seconde jambe du rêve”, celle qui concerne les souvenirs infantiles et plus précisément ce que Freud appelle “ Souvenirs-écrans”.

En raison du texte du rêve, son triomphe sur les troupes ennemies, Hanns Sachs se risque même à évoquer ce que pourrait être son fantasme masturbatoire, si ce n’est son fantasme fondamental en lien avec la scène primitive. Il écrit en effet :
“ Ce genre de rêve de victoire et de conquête est souvent la couverture d’un désir de conquête érotique.

En résumé l’analyste décrit plusieurs niveaux d’interprétation de ce rêve

Premier niveau, résoudre ses problèmes actuels d’homme d”état : Une victoire des armées prussiennes.

Second niveau : il enfin en vacances dans les Alpes, à Gastein

Troisième niveau avec la cravache qui s’étend à l’infini une réalisation sexuelle masturbatoire : Une conquête sexuelle, celle d’une femme pour laquelle ses exploits militaires sont sans doute réalisé.

L’analyste repère de plus un quatrième niveau celui qui consiste à informer en urgence de cette nouvelle, son empereur, nouvelle qui en principe doit rester caché ( la masturbation)

Pour notre part nous pouvons aussi y repérer les signifiants pulsionnels qui sont sans doute mis à l’oeuvre dans ce rêve, avec ces désirs de conquête qui signent sans doute une conception sadique anale du coït, la cravache brandie y participant activement.

A propos de cet analyste hanns Sachs j’ai trouvé sur internet quelques éléments concernant sa biographie et sa bibliographie.
https://shs.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2010-2-page-139?lang=fr&fbclid=IwY2xjawFfOE1leHRuA2FlbQIxMQABHTdpQVB9kNrZ9ngMsRPzWYQK5wsYiTULRuP0-2zQ-TszfH9gBiyF9qrXyw_aem_I97ig2kbe3caGVJAAorJrQ

 

 

 

 

 

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