« Avant-propos » de la première des cinq psychanalyses

Je vois surtout dans cet avant-propos, celui qui introduit la première des cinq psychanalyses,  une argumentation nourrie rédigée à l’avance à l’usage de ces futurs détracteurs. Ce qui le laisse penser c’est le peu de succès qu’a eu son livre de l’Interprétation des rêves et le scandale qu’a provoqué quelques années après, ses trois essais sur la théorie de la sexualité.
Il prend en quelque sorte les devants.
Je passe sur l’exposition de ses scrupules ainsi que sur la difficulté d’exposer un cas et ceci sans prendre de notes, pour arriver directement page 3 à cette question de l’interprétation des rêves.
Freud comptait appeler ce texte : « Rêve et hystérie » pour montrer comment  » l’interprétation des rêves s’entrelace à l’histoire du traitement « . Et il faut remarquer ce terme  » histoire du traitement  » il ne s’agit plus de l’histoire de Dora telle qu’elle l’a racontée au départ, mais de ce qui s’est passé dans l’analyse, cela devient l’histoire de Freud et de Dora, peut-on se risquer à dire que c’est l’histoire des démêlés de Freud avec Dora.

Par ailleurs, avez-vous remarqué combien dans ce texte Freud parle souvent de « technique ».
C’est ce terme qui m’a sauté aux yeux en relisant Dora.
Je trouve que ça vaudrait la peine de s’interroger, à partir de ce texte de Freud sur les rapports qui existent et qui ne sont pas souvent abordé entre
certes la clinique et la théorie analytique mais aussi avec la technique, qui est à proprement parler ce qu’on pourrait appeler le métier du psychanalyste, son tour de main, puis plus mystérieux, celui de l’éthique de la psychanalyse.

La technique du rêve
(p. 4)
Quoiqu’il en soit il part sur la question du rêve :   » J’ai, non sans de bonnes raisons fait précéder en 1900, les travaux que je projetais sur la psychologie des névroses d’une étude approfondie sur les rêves.  »
Et il rajoute une phrase qui est décisive pour sa démonstration : tout un chacun peut analyser ses rêves et donc trouver confirmation par lui-même de tout ce qu’il avance concernant sa découverte de l’inconscient.
 » L’objection qu’on m’opposait, à savoir que mes observations n’auraient pas permis de se former une conviction vérifiable, du fait que je n’avais pas livré mes matériaux n’était, dans ce cas, plus valable, car chacun peut avoir recours à ses propres rêves pour un examen analytique.  »

Il rajoute ceci qui est très important :
 » La technique de l’interprétation des rêves est facile à apprendre d’après les préceptes et les exemples que j’ai donné.
Je soutiens, aujourd’hui comme alors, qu’une condition indispensable pour comprendre les processus psychiques dans l’hystérie et dans les autres psychonévroses est d’approfondir le problème du rêve. Personne n’aura de chance d’avancer, même de quelques pas, dans ce domaine, s’il veut s’épargner ce travail préparatoire.  »

Est-ce que vous ne trouvez pas que Freud, après l’exposé de ses scrupules, de ses incertitudes, à brusquement changé de ton : là il est chez lui, il nous invite dans son domaine, au pays du rêve, en attendant d’avoir accès aux paysages fort variés de la névrose, pour ne pas parler de ceux de la psychose et de la perversion.

La technique de l’analyse : l’association libre

Page 5, Freud après avoir évoqué la technique de l’interprétation du rêve, apporte une précision non moins importante sur la technique de l’analyse :
Elle a, nous dit-il, subit  » une transformation fondamentale « .
 » Le travail avait alors pour point de départ les symptômes et pour but de les résoudre les uns après les autres « .
Avec la nouvelle méthode qu’il décrit, celle de l’association dite, fort ironiquement, libre, L’analysant choisit au jour le jour ce qu’il a envie de raconter. Et le symptôme se déchiffre au bout du compte mais par petit bout.

 » J’obtiens alors ce qui appartient à la solution d’un symptôme par fragments, enchevêtrés dans des contextes différents et répartis sur des époques fort éloignées « . Je trouve que cette description indique bien ce qu’il en est de la surdétermination du symptôme, à la fois quant à sa signification et quant à sa temporalité. Un symptôme s’enrichit au fil du temps, prend de nouvelles valences. Il doit en être ainsi pour la toux de Dora qui remontait à l’enfance mais dont elle souffrait encore au temps de sa rencontre avec Monsieur K .
Nul doute qu’elle ait été réveillée au cours de son analyse.

La partie la plus difficile du travail technique :
Le maniement du transfert

Freud termine cet avant propos par ce qui est resté en suspens dans cette analyse, la question du transfert.
Et là il choisit à nouveau ce terme de technique, concernant le  » maniement du transfert « . C’est la question la plus épineuse du travail de l’analyste.
C’est sur cette question du transfert que l’analyse de Dora s’est inter-rompue. Freud n’avait pas repéré à temps que Dora lui avait rendu son tablier, qu’elle lui avait donné – non pas ses huit jours, mais ses quinze jours.
Dans le milieu viennois de l’époque, il ne faut pas oublier le rôle que jouaient les serviteurs. Les prendre en compte donne un tout autre éclairage de cette histoire clinique.

Comments are closed.

Navigate