Ce rêve est le rêve princeps de cette observation. Bouvet le repère comme étant un moment décisif de cette analyse. On ne peut que lui donner raison pour ce repérage. Cependant on peut donner à ce rêve une toute autre interprétation. Là où Bouvet compte démontrer, à partir de ce rêve, l’importance de la prise en compte de l’envie du pénis dans la cure d’une névrose obsessionnelle, nous pouvons, nous, y lire, décrit de façon lumineuse, une sorte d’appel à la métaphore paternelle en même temps qu’on y lit également en clair ce qui est sa fonction, permettre au sujet d’échapper au désir de la mère.
Mais il est temps de partir du texte même du rêve :
« Je suis dans le service hospitalier où je travaille, ma mère vient dans le service ; elle dit du mal de moi à la surveillante. Je suis furieuse et je sors. Je rentre dans la boutique d’un savetier qui se trouve en face de l’hôpital et j’achète une paire de chaussures : puis tout d’un coup, ouvrant la fenêtre, je me mets à injurier violemment ma mère et le chef de service. »
Bouvet nous livre les associations de ce rêve ainsi que son interprétation mais en tout cas il y a un signifiant de ce rêve qui n’attire par son attention et qui aurait quand même du le frapper, c’est celui de « savetier », parce que même si cette observation date des années 50 à 60, ce terme de savetier était déjà tombé en désuétude. Par contre, ce qui n’était sans doute pas encore tombé en désuétude, c’est le fait qu’on apprenait encore à l’école, les fables de La Fontaine, et donc sans doute Renée avait-elle, elle aussi, appris par cœur la fable du savetier et du financier.
D’autres équivoques signifiantes auraient pu également jouer, celle de « trainer la savate » ou même « un coup de savate », ou encore une expression qu’avait utilisée Lacan, à propos d’un échange un peu vif « d’une savate leste ».
Sans ce repérage, à mon avis, l’essentiel de ce rêve a échappé à l’interprétation de Bouvet… et à nous aussi.